Aujourd'hui c'est Noël! Nous rentrons de la bodega après la journée de travail, mais le ciel est couvert et le vent souffle si fort que c'est presque dangereux de prendre la voiture pour rentrer. Les pronostiques sont confirmés: nous allons avoir du Zonda pour le réveillon de Noël!
Le Zonda est un vent violent, sec et brûlant, qui vient du Pacifique, se décharge de son humidité aux cimes des Andes, et descend à toute vitesse de l'autre côté des montagnes, brûlant les récoltes argentines, faisant tomber des arbres, déjà desséchés par le climat mendocin. C'est un phénomène climatique assez unique, mais qui arrive relativement souvent à Mendoza; d'habitude, c'est en hiver que cela se produit. Tout d'un coup, on passe de 0°C à 30°C, alors on sait que le Zonda va arriver le lendemain. Ecoles, universités et d'autres institutions publiques ferment pour deux jours, et les déplacements deviennent dangereux. L'électricité et l'eau sont souvent coupées, et des incendies se déclenchent facilement.
Or cette fois-ci, nous sommes en plein été dans l'hémisphère sud, donc personne ne s'y attendait. Et surtout pas pour le 24 au soir, dans un pays où l'asado est Roi! Les kilos de "carne" ont été achetées pour toute la famille dans le frigo ; l' "asador" (celui qui s'occupe du barbuc') ne peut pas décevoir. En demandant autour de moi, j'ai eu donc la surprise d'apprendre que ce soir-là, malgré la tempête brûlante qui soufflait dehors, tous les chefs de famille ont fait leur feu dieu sait comment, et ont servi la ronde des viandes et des abats comme il se doit, à point et croustillant s'il-vous-plaît. Je crois qu'on devrait remettre une palme à tous les asadors de cette nuit-là, qui parfois ont même opéré sans électricité.
Par un coup de chance fou, nous avions prévu de la viande au four...!
Vers 17h, alors que nous étions encore à la bodega (en dehors de la ville), la température a augmenté de quelques degrés de plus, et le vent s'est levé. Voici ce qu'annonçait le baromètre, (à côté, le téléphone indique la date, "24 de dic.", 24 décembre): 42,5°C
En ville, la température monte encore, d'un à deux degrés de plus, et le vent se déchaîne. C'est confirmé, pas de dîner sur la terrasse!
Nous mettons la table à l'intérieur, et pour compenser, nous essayons de décorer un peu...
L'ambiance devient alors celle de nos Noël des pays froids, où nous nous réfugions au coeur de l'hiver dans un foyer aux mille couleurs, parfums et saveurs. Dehors, le climat hostile, dedans, la famille réunie autour d'un bon repas, ce festin dont tu parles souvent Yves, plaisir de tous les sens!
Merci maman, il était aussi avec nous ce soir, ton petit sapin de bois!
Autour de la table, Nello, Ceci, Agus, Noëlle (une amie et collègue suisse de la bodega), deux français qui parcourent l'Amérique Latine en vélo, et moi : salud!
Après le melon au Torrontes CarinaE (ce délicieux vin frais, d'un transparent jaune-vert, produit sur les hauts plateaux désertiques de Cafayate, et appelé Menteur pour son bouquet très sucré, rappelant les fruits exotiques et les fleurs, mais au goût sec), nous passons au foie gras, accompagné d'un Passito de los Andes (CarinaE, encore!). Pour la petite histoire, ce vin doux, un peu trouble et d'une jolie couleur ambrée, est issu d'une tradition venue de Pantelleria, une petite île au sud de la Sicile: le Passito est fait avec du muscat, dont une partie de la récolte est séchée au soleil. Lors de la fermentation, ces raisins déshydratés sont versés à trois reprises dans la cuve, ce qui rend le vin sucré, mais de manière naturelle, et surtout à partir de ce même muscat, renforçant les arômes intenses de ce vin. Au nez, très puissant, il rappelle la pomme verte et les abricots, en bouche, beaucoup plus doux, le miel, les abricots secs et pêches sèches. Je crois qu'il ne peut pas être mieux accompagné qu'avec un foie gras...
Alors justement, un très grand merci à ma Marion et à Mathieu de nous avoir régalés ce soir de ce merveilleux foie gras qui a fait tant de kilomètres! Il a été plus qu'apprécié. Nello a même demandé "Pero, qué es este paté tan delicioso??" c'était son premier foie gras, et il a adoré!
Pour la suite du menu, filet mignon de porc sauce aigre-douce à la moutarde, accompagné d'un Grand Réserve Malbec 2008, de 15 mois de fût de chêne français, un vin élégant, au corps sombre et soyeux, très concentré, aux arômes de fruits mûrs et fruits secs, et au final très long, rond, presque sucré. Pour ceux qui n'aimaient pas le jeu trop sucré de la sauce et du vin, nous avions aussi un Grand Réserve Syrah de la même année, un vin très puissant, sombre, velouté et tannique, un beau syrah respirant le cuir, les fleurs de violette et les baies noires.
Et le meilleur pour la fin, sûrement. Quelques jours auparavant, dans un petit restau-bar, nous avions découvert avec Agus un vin vraiment délicieux:
Las Perdices (Les Perdrix) 2010 Reserva, Pinot Noir. Un vin qui n'a l'air de rien, un corps plutôt léger et transparent, mais le bouquet surprend et dévoile déjà un très bon vin, et une fois en bouche, tous les arômes se développent comme par magie. Pour moi, c'est l'équilibre parfait entre les épices, les fleurs et les fruits. Je ne saurais pas trop le décrire mais en ce moment, c'est mon vin rouge préféré!
C'est donc celui-là qu'on a choisi pour le fromage (encore merci, Marion et Mat!).
Au fil des plats et des conversations, il est déjà minuit! Le vent est enfin tombé, nous allons pouvoir trinquer sur la terrasse, s'offrir nos cadeaux, et pouvoir même assister, chose que nul n'espérait plus à cause de la tempête, à quelques feux d'artifice! Comme toujours, le turron, les garrapiñadas et autres sucreries accompagnent ce moment.
Et après la bûche de Noël rapportée par nos amis français, nous partons pour la seconde partie de cette fête de Noël bien argentine: place à la danse!
Quelques jours plus tard, c'est déjà le Nouvel An. Ce soir, Agus nous invite, Noëlle et moi, dans un endroit surprise. Le taxi nous dépose dans la rue limitrophe de la ville, près de la gare de bus, devant une maison particulière, mal éclairée. Mais quand on nous ouvre la porte, nous découvrons...
Une ancienne maison remodelée, une entrée étonnante aux bouteilles dressées, l'escalier et la véranda en fer forgé, les tommettes et la terre rouge des sculptures, le patio fleuri, le carrelage noir et blanc... Bienvenus! vous êtes ici chez vous, nous souhaite Gonzalo, le propriétaire de ce petit coin de paradis. (Si vous avez envie de voir ça de plus près, voici un lien.)
Nous faisons la connaissance de trois russes, couple+belle-mère, fort sympathiques (liatibialiubiu? Nasdrovie!!!!). Le reste des convives l'était beaucoup moins, tous de blonds et vieux danois peu rigolards, mais qui ne nous ont pas empêchés de passer une magnifique soirée. Bravo et merci Agus pour avoir déniché ça, ta suprise est plus que réussie... :)
Gonzalo, le propriétaire, nous dit que nous sommes les seuls locaux ce soir, il s'en étonne et charie Agustin. Il nous invite à déhambuler, prendre un verre, bon, les danois se sont tous assis à leur table mais ce n'était pas le but. Il nous explique aussi qu'il a eu envie de faire cet atypique restau/chambre d'hôte il y a cinq ans, mais qu'il a la bougeotte, qu'il repartira sans doute bientôt. Et puis, il repart, salue d'autres invités, how are you Stephany? toujours aussi détendu, le sourire au lèvres. Il rayonne, Gonzalo, on se sent vraiment bien chez lui.
Notre table dans le petit patio (oui j'en connais une qui aurait aimé la véranda!)
Noëlle résistant aux yeux doux de son empanada de truite aux poireaux
L'entrée aux bouteilles
Chin chin!
Gonzalo nous montre comment préparer de petites tourtes à la viande dans son four en terre personnel. La classe. Certes, il fait dans les 35°C dehors, 10°C de plus devant le four...
La soirée continue, farandole de petits plats, de très bons vins présentés par Facundo, le sommelier avec qui l'on bavarde, musique parfaite, bossanova, Buena Vista, Kusturica...
Ca y est, il est minuit!! Bonne année, Feliz 2013!!!!!! Nous embrassons Danois, Russes, locaux, et trinquons à votre santé, bien-sûr, amis et famille, loin des yeux mais toujours dans nos coeurs! Que 2013 vous sourie!
Un 31 magique, dont on se souviendra en Argentine, en France et en Suisse ;)
Quelques pas de tango avant d'aller danser ailleurs de la cumbia et du cuarteto
Chan chan! Bienvenue à cette nouvelle année!
Et voici les premiers rayons de soleil de cette nouvelle année! un moment très beau et plein d'espérance, que je vous transmets à vous aussi :)
Je vous souhaite une merveilleuse année 2013!!
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